Drive Blind – Be A Vegetable

Drive Blind tire son nom d’une chanson de Ride, groupe étendard du shoegaze, version anglo-celte de la saturation sous l’égide des légendaires My Bloody Valentine et des Beatles*, comme au final à peu prêt tout ce qui vient de là-bas. Mais si quelques coupes au bol bruissent encore sous le mistral de Nîmes et Montpellier, Drive Blind lorgne du côté du boucan ricain – Nirvana en tête – qui a de toute façon enterré dès 1992 son cousin briton sous des torrents de boue grunge.

Drive Blind ronronne sur ses premiers EP un indie rock plaisant mais entame en cachette un régime à base de Sonic YouthJesus Lizard ou bien encore Helmet dont « Be a Vegetable », sorti en 1996, sera l’aboutissement. Le groupe ne se dépare pas de ses mélodies qu’il emmenait déjà sur son tricycle le long des plages, de New York-lès-Maguelone à Sètatle. Mais plus affûté que jamais, c’est maintenant en VTT sur les pierriers du Mont Aigoual et du Pic Saint Loup qu’il les trimballe. Ça monte, ça descend, ça secoue, ça fait mal aux cuisses mais le point de vue en vaut vraiment la peine : c’est tout simplement le meilleur disque de rock’n’roll français. Drive Blind respire le rock US à pleins poumons mais pue l’inspiration. Tout se fredonne, tout se beugle, tout est bon dans le légume : de « Fear » qui ouvre l’album, avec une voix qui évoque une Kim Gordon qui chanterait juste, à un « Soul Beauty » groovy comme une fraiseuse. En passant par « One Reason To Smile » et « 14th January » qui feront regretter à jamais de ne pas avoir assisté à un seul concert de Drive Blind. « Be A Vegetable » est un disque d’avant Internet. Avant eBay et Le Bon Coin, avant d’y passer son temps à dénicher un synthé modulaire tchécoslovaque, une reverb à ressort de 1903 ou un vinyle de krautrock flamand et de transformer le rock en musique de brocanteurs et d’antiquaires, bordel de merde.

L’aventure Drive Blind se finit avec « Be A Vegetable », les uns se mettront au vélo électro dans Rinôçérôse, les autres continueront de pédaler dans le maquis avec Tantrum sur des sentiers de plus en plus escarpés.

* cf. « It’s All Too Much », sur « Yellow Submarine » en 1969.